S'entraîner à la frustration pour préserver sa capacité de penser

On le sait, le monde change. Ce qui est utile un jour devient obsolète, tout comme ce qui est à la mode devient rapidement dépassé. Tout va toujours plus vite, plus loin, plus efficacement, plus facilement... pour le plaisir. Cette sensation agréable liée à la satisfaction d'un désir, d'un besoin matériel ou mental.

Nous vivons dans une civilisation qui encourage la satisfaction immédiate. Nous pouvons manger au-delà de notre faim, consommer, acheter au-delà de la nécessité et satisfaire nos envies d'informations par le biais de tous les réseaux sociaux et autres canaux d'informations jusqu'à l'infobésité.

La consommation numérique ou l'hyper connectivité est l'alliée du circuit de la récompense, offrant un bain de dopamine (neurotransmetteur directement impliqué dans la sensation de plaisir) et hackant une partie de nos vies. Si le fait de passer plusieurs heures par jour suspendus à nos écrans était le seul inconvénient, cela serait un moindre mal.

Le vrai problème réside surtout dans le fait qu'en répondant immédiatement à nos envies, nous devenons des êtres pulsionnels, peu enclins à accepter les frustrations et perdons notre capacité réflexive. En bref, notre capacité de penser.

Au-delà de sa suractivation par la prise à répétition de molécules spécifiques comme certaines drogues qui conduisent à l'addiction ; notre circuit de la récompense est aussi à l'origine de changements dans le monde, dans notre société, nos entreprises, nos familles... Alors qu'en est-il chez chacun d'entre nous ?

Notre cerveau est notre chef d'orchestre et nous savons que ses capacités sont immenses. 

Si les neurosciences n'ont pas fini d'en percer tous les mystères, elles ont clairement mis en lumière la puissance du circuit de la récompense (L'aire tegmentale ventrale, le striatum et le noyau accumbens).

Si nous sommes biologiquement programmés pour satisfaire ce circuit, ceci n'est pas sans conséquence.

Pour assouvir immédiatement un désir, le comportement change. C'est la porte ouverte à l'égocentrisme et à la chosification des autres. En effet, qui n’a jamais cédé à l'irrépressible envie de lire un sms, voire même d’y répondre en conduisant ?... La tentation de satisfaire sa curiosité, son envie immédiate est grande, faisant alors fi de tous les autres.

Le risque est le même dans les entreprises. Mené par notre circuit de la récompense, nous recherchons et attendons des réponses immédiates, au mépris de l'analyse et parfois de la réalité, des besoins ou possibilités des collaborateurs.

Pour trouver un bon équilibre entre plaisir et frustration, il est nécessaire de reconnaître la puissance du circuit de la récompense et de réfréner nos pulsions. Il est toujours possible d’entraîner et de muscler notre tolérance à la frustration. Tentez régulièrement l’expérience de renoncer à consulter votre téléphone pendant une réunion ou un déjeuner par exemple.

Redonnons consciemment toute la force à notre libre arbitre !